XXVIII. REFLEXIONS SUR CES VISIONS
Toutes les fois qu'en méditant sur la douloureuse Passion de
Notre-Seigneur, j'entends cet effroyable cri des Juifs : Que son sang soit sur nous et sur nos
enfants ! L'effet de cette malédiction
solennelle m'est montré et rendu sensible par de merveilleuses et terribles
images. Il me semble voir au-dessus du peuple qui rie, un ciel sombre, couvert
de nuages sanglants, d'où partent comme des verges et des glaives de feu. C'est
comme si cette malédiction pénétrait jusqu'à la moelle de leurs os et
atteignait jusqu'aux enfants dans le sein de leur Mère. Tout le peuple me
parait enveloppé de ténèbres : leur cri sort de leur bouche comme un trait de
feu sombre qui revient sur eux, rentre profondément dans quelques-uns et voltige
seulement sur quelques autres.
Ceux-ci sont ceux qui se convertirent après la mort de Jésus : leur
nombre fut assez considérable, car, pendant toutes ces horribles souffrances,
Jésus et Marie ne cessèrent pas de prier pour le salut des bourreaux, et tous
ces affreux traitements ne leur causèrent pas un instant d'irritation. Pendant
tout le cours de
Lorsque, pendant des visions de ce genre, je tourne mes pensées vers les
âmes des ennemis de Jésus et sur celles du Sauveur et de sa sainte Mère, tout
ce qui s'y passe m'est montré sous diverses figures que les gens d'alors ne
voyaient pas, quoiqu'ils ressentissent l'impression de ce qu'elles représentent.
Je vois une infinité de démons s'agiter parmi la multitude : je les vois
exciter, pousser les Juifs, leur parler à l'oreille, leur entrer dans la
bouche, les animer contre Jésus et trembler pourtant à la vue de son amour et
de sa patience inaltérable. Mais dans tout ce qu'ils font, il y a quelque chose
de désespéré, de confus, de contradictoire : c'est un tiraillement désordonné
et insensé dans tous les sens. Autour de Jésus, de Marie, et du petit nombre de
saints qui sont là, beaucoup d'anges sont rassemblés ; leur figure et leurs
vêtements différent selon leurs fonctions ; leurs actions représentent la
consolation, la prière, l'onction ou quelqu'une des oeuvres de miséricorde.
Je vois également des voix consolantes ou menaçantes sortir de la bouche
de ces diverses apparitions comme des rayons diversement lumineux ou colorés ;
si ce sont des messages, je les vois dans leurs mains sous forme d'écriteaux.
Je vois aussi souvent, lorsque je dois en être instruite, les mouvements de
l'âme, les souffrances intérieures, en un mot tous les sentiments se montrer à
travers la poitrine et tout le corps sous mille formes lumineuses ou
ténébreuses, suivant des directions différentes avec divers degrés de lenteur
ou de vitesse. Je comprends alors tout cela, mais c'est impossible à expliquer
parce qu'il y a infiniment trop de choses ; d'ailleurs je suis si malade et si
accablée par la douleur que me causent mes péchés et ceux de tous les hommes,
je suis si déchirée par les souffrances de Notre-Seigneur que je ne sais
comment je puis mettre le moindre ordre dans ce que je raconte. Beaucoup de ces
choses, spécialement les apparitions de démons et d'anges, racontées par
d'autres personnes qui ont eu des visions de
La malade parlait souvent d'objets de cette nature, soit pendant ses
visions de