LXV. RESURRECTION DU SEIGNEUR
Je vis apparaître l'âme de Jésus comme une gloire resplendissante entre
deux anges en habits de guerre (les deux anges que j'avais vus précédemment
étaient en habits sacerdotaux) ; une multitude de figures lumineuses l'environnait.
Pénétrant à travers le rocher, elle vint se reposer sur son corps très saint :
elle sembla se pencher sur lui et se confondit tout d'un coup avec lui. Je vis
alors les membres se remuer dans leurs enveloppes, et le corps vivant et
resplendissant Au Seigneur uni à son âme et à sa divinité, se dégager du
linceul par le côté, comme s'il sortait de la plaie faite par la lance : cette
vue me rappela Eve sortant du côté d'Adam. Tout était éblouissant de lumière.
Il me sembla au même moment qu'une forme
monstrueuse sortait de terre au-dessous du tombeau. Elle avait une queue de
serpent et une tête de dragon qu'elle levait contre Jésus ! Je crois me
souvenir qu'elle avait en outre une tête humaine. Mais je vis à la main du
Sauveur ressuscité un beau bâton blanc au haut duquel était un étendard
flottant : il marcha sur la tête du dragon et frappa trois fois avec le bâton
sur sa queue ; à chaque coup, je vis le monstre se replier davantage sur
lui-même, diminuer de grosseur et disparaître : la tête du dragon était rentrée
sous terre, la tête humaine paraissait encore. J'ai souvent eu cette vision
lors de la résurrection, et j'ai vu un serpent pareil qui semblait en embuscade
lors de la conception du Christ. Il me rappela celui du Paradis ; seulement il
était encore plus horrible. Je pense que ceci se rapporte à la prophétie : La
semence de la femme écrasera la tête du serpent. Tout cela me parut seulement
un symbole de la victoire remportée sur la mort, car lorsque je vis le Sauveur
écraser la tête du dragon, je ne vis plus de tombeau.
Je vis bientôt Jésus resplendissant s'élever à travers le rocher. La
terre trembla ; un ange, semblable à un guerrier, se précipita comme un éclair
du ciel dans le tombeau, mit la pierre à droite et s'assit dessus. La secousse
fut telle que les lanternes s'agitèrent violemment et que la flamme jaillit de
tous les côtés. A cette vue, les gardes tombèrent comme atteints de paralysie ;
ils restèrent étendus par terre, les membres contournés et ne donnant plus
signe de vie. Cassius, ébloui d'abord par l'éclat de la lumière, revint
promptement à lui et s'approcha du tombeau : il entrouvrit la porte, toucha les
linges vides, et se retira dans le dessein d'annoncer à Pilate ce qui était
arrivé. Toutefois il attendit encore un peu, dans l'espoir de voir quelque
chose de plus ; car il avait senti le tremblement de terre, il avait vu la
pierre jetée de côté, l'ange assis dessus et le tombeau vide, mais il n'avait
pas aperçu Jésus. Ces premiers événements furent racontés aux disciples soit
par Cassius, soit par les gardes.
Au moment où l'ange entra dans le tombeau et où la terre trembla je vis
le Sauveur ressuscité apparaître à sa Mère près du Calvaire. Il était merveilleusement beau et radieux.
Son vêtement, semblable à un manteau, flottait derrière lui, et semblait d'un
blanc bleuâtre, comme la fumée vue au soleil. Ses blessures étaient larges et
resplendissantes ; on pouvait passer le doigt dans celles des mains. Des rayons
allaient du milieu des mains au bout des doigts. Les âmes des patriarches
s'inclinèrent devant