XXXIII. SIMON DE CYRENE , TROISIEME
CHUTE DE JESUS
Le cortège arriva à la porte d'un vieux mur intérieur de la ville.
Devant cette porte est une place où aboutissent trois rues. Là, Jésus, ayant à passer
encore par-dessus une grosse pierre, trébucha et s'affaissa ; la crois roula à
terre près de lui ; lui-même, cherchant à s'appuyer sur la pierre, tomba
misérablement tout de son long et il ne put plus se relever. Des gens bien
vêtus qui se rendaient au Temple passèrent par là et s'écrièrent avec
compassion : Hélas ! le pauvre homme se
meurt ! Il y eut quelque tumulte on ne
pouvait plus remettre Jésus sur ses pieds, et les Pharisiens, qui conduisaient
la marche, dirent aux soldats : Nous ne
pourrons pas l'amener vivant, si vous ne trouvez quelqu'un pour porter sa croix
. Ils virent à peu de distance un païen, nommé Simon de Cyrène, accompagné de
ses trois enfants, et portant sous le bras un paquet de menues branches, car il
était jardinier et venait de travailler dans les jardins situés près du mur
oriental de la ville. Chaque année, il venait à Jérusalem pour la fête, avec sa
femme et ses enfants, et s'employait à tailler des haies comme d'autres gens de
sa profession. Il se trouvait au milieu de la foule dont il ne pouvait se
dégager, et quand les soldats reconnurent à son habit que c'était un païen et
un ouvrier de la classe inférieure, ils s'emparèrent de lui et lui dirent
d'aider le Galiléen à porter sa croix. Il s'en défendit d'abord et montra une
grande répugnance, mais il fallut céder à la force. Ses enfants criaient et
pleuraient, et quelques femmes qui le connaissaient les prirent avec elles.
Simon ressentait beaucoup de dégoût et de répugnance à cause du triste état où
se trouvait Jésus et de ses habits tout souillés de boue ; mais Jésus pleurait
et le regardait de l'air le plus touchant. Simon l'aida à se relever, et
aussitôt les archers attachèrent beaucoup plus à l’arrière l'un des bras de la
croix qu'ils assujettirent sur l'épaule de Simon. Il suivait immédiatement
Jésus, dont le fardeau était ainsi allégé. Les archers placèrent aussi
autrement la couronne d'épines. Cela fait, le cortège se remit en marche. Simon
était un homme robuste, âgé de quarante ans ;il avait la tête nue : son vêtement
de dessus était court : il avait autour des reins des morceaux d'étoffe : ses
sandales, assujetties autour des jambes par des courroies, se terminaient en
pointe : ses fils portaient des robes bariolées. Deux étaient déjà grands ; ils
s'appelaient Rufus et Alexandre, et se réunirent plus tard aux disciples. Le
troisième était plus petit, et je l'ai vu encore enfant prés de saint Etienne.
Simon ne porta pas longtemps la croix derrière Jésus sans se sentir
profondément touché.